Samedi 8/2 Batang Ai (Lubok Kasai)
Samedi 8/2 Batang Ai (Lubok Kasai)
En fait de balade nocturne hier, nous avons suivi l’un des boatmen à la chasse aux grenouilles. Pour cela, nous marchons dans l’eau de la rivière, parfois jusqu’à la taille, en éclairant les rives à la torche. Des yeux brillants signalent soir une araignée soit une grenouille. Rouge, c’est un crapaud, souvent vénéneux. Lorsqu’il repère une grenouille assez grosse, il la fixe avec sa lampe pour l’aveugler et la paralyser. Puis, d’un geste vif, il la saisit par l’arrière. Pour l’immobiliser, il lui casse les pattes arrières. Il en attrapera une douzaine dans la soirée. L’eau est bonne, la lune éclaire les branche donnant un air mystique à la rivière. Et à 22h, tout le monde au lit.
Ce matin, le soleil est de la partie. La nuit est calme mais non dénuée de sons. Cigales, oiseaux, grenouilles, chauve-souris, c’est tout un concert qui berce mon sommeil. Je suis simplement réveillé par la fraicheur de la nuit.
Au petit déjeuner, Edgar, me parle un peu plus des Ibans. Ils ont leur propre dialecte que lui, d’une tribu de la cote, a du apprendre. Les tatouages sur leur corps représentent chacun une histoire. Au passage à l’âge adulte, une fleur est tatouée sur l’épaule. L’homme peut alors partir voir le monde, d’autres tribus. Les plus modernes partent travailler sur les plateformes pétrolières au large de Singapour, de la Malaisie ou bien plus loin. Ils ne reviendront s’installer à la Maison longue qu’apres le mariage.
Les ancêtres des Ibans étaient aussi chasseurs de tètes. Les crânes des ennemis étaient fumés, vidés et réduits. Puis la tribu les accrochait au plafond de la terrasse commune. Loin d’une simple cruauté, cette pratique s’accompagnait d’une réelle vénération pour ce que représentaient ces trophées. Chaque année, ils les nourrissaient, les nettoyaient. Cette pratique a été éradiquée à la fin du 19eme siècle par le Rajah Blanc (James Brooke). Edgar me précise qu’il en reste pourtant encore dans la plupart des longhouses, mais la mémoire liée a disparu.
Départ pour 4h de trek dans les collines sauvages. Je me fais la même réflexion qu’hier : mais où est donc la faune ? Des insectes, de rares oiseaux mais peu d’animaux… La marche n’en est pas moins plaisante malgré la température déjà élevée (30°C à 9h) et la forte humidité. Ca reste une foret pluviale…. Dans le parc, elle est divisée en deux fois deux types. Tout d’abord, la foret primaire, originelle, caractérisée par de grands arbres et un sol presque libre, dû à la lutte vers le soleil. Ensuite, la foret régénérée qui a reprise ses droits en lieu et place d’anciennes cultures. Elle est bien plus dense, avec une végétation plus jeune. L’autre séparation est géologique. La partie Ouest de Sarawak et du parc est bien plis ancienne que la partie Est. Imperceptible à l’œil non éclairé, les deux parties comportent pourtant une faune et une flore bien différente, formant des barrières naturelles aux migrations.
En tout cas, c’est vert !
Au plus profond de la jungle, nous apercevons le mouvement de balancier des arbres, si caractéristique de la « marche » d’un orang-outan. C’est d’abord, un jeune que nous voyons. Il est encore de taille modeste et joue de branche en branche. Trop rapide, il est impossible à suivre, ou à fixer. Mais qui dit enfant, dit maman. Des branches bougent à quelques dizaines de mètres. Une mère et son nouveau né ! Celle-ci semble moins expérimentée que celle d’hier. Elle mettra plusieurs minutes à nous apercevoir et s’exposera énormément. A mon plus grand plaisir de l’observer. C’est fascinant ! Et nous restons encore de longues minutes à une centaine de mètres avant qu’elle ne se fâche et nous enjoigne à partir.
Plus nous montons, plus j’observe l’étendue de la jungle. C’est vert à perte de vue. Il faut garder en tète qu’en cas de problème, il faudra 90minutes d’hélico (par temps clair) ou plus de 7h de pirogue et van pour atteindre l’hôpital de Kuching. Les dispensaires le long de la rivière se servent que d’infirmerie locale et de premiers soins.
Retour au camp où je plonge dans la rivière. Je sue comme un porc mais c’était une bonne session. Désormais, c’est déjeuner et repos. L’avantage d’être le seul touriste, c’est que j’ai l’endroit pour moi tout seul ! Edgar et les boatmen dorment dans une cabane à part, en plein air mais couvert. Ce calme fait du bien et je reprends vie été plaisir après plusieurs jours bougon (au mieux).
Pour le déjeuner, riz, poulet, bœuf au curry et légumes. Je goute aussi le poisson pêché hier. Cuit au bambou, c’est super bon ! En dessert, c’est rambutan. Rambu signifie poil et utan, foret. C’est dont un fruit de la foret à l’apparence poilue. Chaire blanche et excellent gout sucré. Les boatmen se sont fait les grenouilles d’hier soir. Apparemment ca a un gout de poulet. Ce matin, ils ont pêché à la main une tortue de rivière d’une vingtaine de centimètres. Ils la videront et la prépareront pour un repas. Ca ressemble a du poisson, il parait. Je ne sais pas si cette espèce en particulier est en danger. En tout cas, ce n’est pas à moi de juger. La jungle dicte ses lois. Et ces communautés ont certainement une vie plus en lien avec la nature que nos bureaucrates occidentaux.
Allez, un bouquin face à la jungle et une petite brise de rivière. Et une bière svp ! Comment ca « ca passe pas ici » ???
En fin d’après-midi, dernière petite marche dans la jungle. On revient bredouille mais quelques macaques à longue queue nous attendent sur les hauteurs du camp. Trop furtifs, je ne les aperçois que brièvement.
Rien de prévu ce soir. On rentre demain vers Kuching. 3h de pirogue et 4-5h de van. En n’espérant aucune pluie pour la première partie !
De toute façon, le moindre effort ici me met en nage. Je ne suis plus à une averse tropicale prés !
Dernières lignes de la soirée à la bougie à huile. La lune est pleine et éclaire le camp. On distingue même les étoiles. Une chaleur douce de fin d’été qu’accompagne une petite brise nocturne venant de la rivière et de la foret. Une vingtaine de papillon ont élu domicile sur une de mes chaussettes qui sèchent sur la balustrâtes. Quelques fourmis dans la chambre que la moustiquaire calmera. Apres tout, je suis un peu chez elles !
Orang Outan in Batang Hai 1
Orang Outan in Batang Hai 2
Orang Outan in Batang Hai 3
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