Dimanche 31/03 Kyanjin Ri (4773m)/ Thyangsyap (3140m)
Dimanche 31/03 Kyanjin Ri (4773m)/ Thyangsyap (3140m)
Inaugurer mes bâtons de marche dans un sommet himalayen, ca a de la gueule non ? Découvrir que j’ai les pneus lisses en pleine ascension, beaucoup moins. La journée a été difficile mais en valait les efforts. Réveillé à 5h, nuit plutôt moyenne. Vers 6h, on s’attaque au Kyanjin Ri. Le ciel, comme espéré, est clair, le froid pas trop pinçant. Il a neigé une bonne partie de la nuit. Et même si c’est joli, ca ne facilitera pas la montée. 900m de dénivelé positif. On commence tranquillement, comme il se doit à cette altitude. Quelques difficultés au départ puis on prend le rythme. Le souffle est bon, les jambes suivent. Puis la neige vient s’en mêler. Essayez de monter le Tourmalet sous la neige avec des pneus été... maintenant faites le avec des pneus lisses. C’est moi sur les derniers 100m d’ascension.
Enfin nous y sommes ! 4773m, record personnel. Grace à l’aide du porteur qui me poussera sur quelques mètres à plus de 50-60%. Mais quelle vue ! A 360°, l’Himalaya nous présente un bel échantillon de 6000m enneigés protégeant la vallée qui s’étale à nos pieds. Faisant pace au soleil, le maitre des lieux, le Langtang Lurung ouvre son cirque à nos yeux d’enfants. Il nous accueille par une sublime coulée blanche. On ne se lasse pas de la beauté du monde !
Le plus dur reste à venir. Mes chaussures ne se sont pas vues pousser des crampons sous la bénédiction des drapeaux bouddhistes. La descente de ces fameux passages pentus et enneigés est un vrai calvaire. Le porteur doit me préparer le chemin et parfois m’attraper pour éviter le toboggan de la mort. Ca m’apprendra à ne pas vérifier mes armes avant l’attaque. Des chaussures qui n’ont pas 2ans, et il va déjà falloir les changer…
Le retour de la terre à mi-chemin de la descente me revigore. Et après un bref passage à l’auberge, direction le retour. Le parcours est le même qu’à la montée mais le ciel est bleu, le soleil généreux et la descente douce en font une balade agréable. On se croirait presque à Payolle (presque). Je ménage mon genou qui a bien souffert dans la descente et laisse mes trois compères prendre le large. Je suis un moment seul dans ce décor à couper le souffle. Je suis bien.
Quoi qu’avec tous ces efforts, je commence à avoir faim, presque une faiblesse. Arrêt « plâtrée de pates » à Mundu qui me requinque. Le vent s’est levé, les nuages couvrent désormais la vallée. Encore deux petites heures de marche et nous atteindrons Thyangsyap et la Summit guest house. On retrouve le style bungalow mais le lieu est agréable et l’eau de la douche commune est chaude. Apres trois jours à l’eau froide, c’est un pur bonheur. Sans l’ascension de ce matin, on est à plus de 30km de montée dans la vallée et la même en descente d’ici deux jours. 3300m positifs déjà dans les jambes, autant en négatif au final. Ca fait les cuisses !
Toujours cette même salle commune dans le refuge. La seule avec un poêle à bois. On s’y retrouve pour manger, discuter, écrire et lire. En parlant de lire, je viens de finir l’excellent bouquin de N. Delesalle ‘le gout du marge ». Le temps d’un trajet en cargo en Anvers et Istanbul, il nous livre quelques-unes de ses incroyables anecdotes humaines de journaliste-écrivain. Il y loue les rencontres humaines comme il dépeint la froide cruauté des hommes. Pas de grands événements ici. Justes les à-côtés, de ceux qui ne passeront jamais à la TV, comme il l’explique lui-même. Tout en décrivant la semi-solitude à bord du MSC Cordoba, il donne une leçon de vie, de perspective. Un appel à ceux qui ont… le gout du large !
Cela fait écho à la discussion que j’ai eu avec l’australien, hier prés du stupa de Kyanjin Gumba. Nous parlions vie et travail. Il a quitté des études d’ingénieur pour voyager et travailler sur des projets de développement durable. J’ai alors expliqué mon travail. Il s’est arrêté de marcher et m’a demandé, très neutre : « Tu aimes ton travail ? » Je n’ai pas su quoi répondre. Il avait sa réponse. Tout ca à cause d’un livre ! Vite, passons au suivant. Jack Kerouac. « Sur la route ». Et merde…
PS : Soirée sympa à discuter voyage avec une allemande dans la soixantaine qui prend son temps pour faire ce trek. Diner de Relpu, une soupe de pommes de terre roulées et épicées. EJ, notre guide, nous fait gouter de la viande de yak marinée : ca tend vers le bœuf mais en plus goutu (la marinade d’épices aide !)
Kyanjin Ri (4773m) 360°
Avalanche sur le Langtang Lurung
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